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04/02/2013

Free Church of Country Sports

FreeChruchCountrySports.JPGLe 18 février, l’Angleterre abolira définitivement la chasse à courre – à moins que Dieu n’en décide autrement. Refusant de voir le gouvernement sonner l’hallali de leur sport favori, des chasseurs se sont constitués en Eglise. La chasse au renard est une religion, clament les fidèles de la Free Church of Country Sports (Eglise libre des sports de nature). L’interdire, c’est bafouer les droits d’une minorité religieuse.

Cet été, le gouvernement britannique a entériné l’abattage rituel des animaux de boucherie chez les juifs et les musulmans – une décision prise “au nom de la liberté religieuse et des libertés fondamentales de la population du pays”. Or qu’est-ce que la chasse au renard, plaide la Free Church, sinon de l’abattage ritualisé ? “Sans compter que, dans notre cas, l’animal a plus de chances de s’échapper que d’être tué”, commente Rod Brammer, un des pères fondateurs de l’Eglise, qui dirige une école de tir dans le Devon. Les parallèles entre religions établies et sports de nature abondent. “Les personnes de confession juive sonnent de la trompe, le shofar, et nous aussi.” Les chasseurs baptisent leurs enfants : lors d’une cérémonie d’initiation, ils maculent leur joue de sang avec la queue d’un renard fraîchement tué. “Est-ce plus étrange que de les habiller de blanc et de les immerger dans l’eau ?” La Free Church a son saint patron, Hubert, un chasseur qui renonça aux biens de ce monde après avoir vu un cerf qui portait un crucifix entre ses bois un vendredi saint. (Cette apparition ne tempéra en rien son enthousiasme cynégétique. Il chassa plus encore, mais au sein de l’Eglise). Le dimanche précédant la Saint-Hubert, des centaines de fidèles se sont réunis dans le Worcestershire pour bénir les chiens courants.

“La chasse est un culte authentique”, affirment les tenants de la Free Church. “La nature est une expérience religieuse. Pêcher ou tirer une proie, c’est un des plus beaux aspects de la vie”, s’émeut M. Gardner, éditeur du Countryman’s Weekly. “Nous n’invoquons pas le nom du Seigneur en vain. Beaucoup de passionnés de chasse et de pêche sont des chrétiens convaincus. Si vous prenez le temps de discuter avec eux, ils vous diront que leur vie au contact de la nature constitue une part importante de leur croyance religieuse. Tout ce que nous faisons, c’est affirmer que nous sommes une congrégation à part. Nous sommes différents. Nous tirons une grande inspiration spirituelle de la nature.”

Créée en 2001 pour donner voix au monde rural pendant l’épidémie de fièvre aphteuse, l’Eglise revendique près de 12 000 fidèles. Depuis le 15 septembre – jour de l’adoption du projet de loi anti-chasse à courre par la Chambre basse –, les nouveaux convertis affluent. Ils seraient 400 à 700 par jour à s’inscrire sur le site Internet (www.saint-hubert.org) de la Free Church. Parmi les nouvelles recrues, un chanoine, une vicomtesse, Clarissa (n° 1995), et une jeune femme si enthousiaste qu’elle s’est enregistrée deux fois, sous les nos 4843 et 4844.

Dans les magasins d’articles de chasse et les foires agricoles, des affichettes appellent à rejoindre la vraie foi. “La chasse et la pêche peuvent et doivent être une religion. Nous avons entrepris des démarches pour faire reconnaître la Free Church comme organisation religieuse. Quand ce sera fait, le gouvernement ne pourra pas nous attaquer. La justice devra se prononcer : c’est précisément ce que nous voulons.” Car les nouveaux prélats sont bien décidés à en découdre. Outre la discrimination religieuse, l’Eglise compte bien plaider la discrimination raciale, en faisant valoir la loi sur les droits de l’homme adoptée en 1998 par l’actuel gouvernement. L’article 9 établit le droit d’exercer sa religion ou ses croyances, l’article 14 interdit toute discrimination, qu’elle soit fondée sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou autres. “Le monde rural forme une minorité ethnique, et nous sommes de plus en plus ostracisés”, s’insurge l’agronome John Milne, un des piliers de la Free Church. “Nous n’avons pas la même perception de la campagne et de ses richesses naturelles que les autres, renchérit M. Gardner. Les adeptes des sports de nature ont leur propre littérature et leur propre expression artistique depuis des siècles.” “Nous sommes ethniquement et culturellement différents.” Différents, mais œcuméniques. L’Eglise est ouverte à “tous ceux qui ont trouvé Dieu dans la gloire de ses œuvres naturelles”.

 

(Daniel Foggo, The Daily Telegraph ;

BBC News ; The Independent, Londres ;

The Scotsman, Edimbourg)

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