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01/09/2010

Le Grand Débat (3): Pédophilie et dépressurisation

 

Reflet.gifPour se prémunir d'accusations d'attouchements sexuels sur des mineurs non accompagnés à bord de ses avions, la compagnie Air France a décidé de les faire voyager sans adulte à proximité immédiate, au risque, estiment les syndicats, de mettre en cause la sécurité des enfants.

"La nouvelle réglementation concernant les UM ("unaccompanied minors") stipule qu'il ne doit pas y avoir de passager adulte sur le même bloc siège sauf en cas de cabine complète", a expliqué lundi à l'AFP Jean-Marc Quattrochi, délégué syndical à l'UNAC, l'un des syndicats des hôtesses et stewards.

Cette directive figure dans le nouveau manuel de sécurité et de sauvetage des personnels navigants commerciaux (PNC) édité en février. Elle aurait été édictée à la suite de plaintes sur des vols long-courriers en particulier, vers les Etats-Unis, selon plusieurs sources internes.

"Le nombre de plaintes est confidentiel, Air France n'a évidemment pas envie d'en faire publicité", explique-t-on chez Alter, syndicat de pilotes. "Le service juridique redoute à l'évidence d'être mis en cause pour négligence en ayant laissé un adulte (qui s'avérerait pédophile) à côté d'un UM s'il y avait la possibilité de le mettre ailleurs", ajoute-t-on.

Le texte – interne à Air France – précise toutefois que "la présence d'un passager adulte sur un bloc siège adjacent, en priorité, le siège situé de l'autre côté de l'allée est impérative". Une précaution que les syndicats jugent insuffisante.

"Cela va à l'encontre de la sécurité des vols et des enfants. Comment un passager assis de l'autre côté pourrait-il venir en aide à un enfant assis côté hublot ?", interroge Guillaume Pollard, délégué Alter.

Il souligne que cette directive est en particulier en contradiction avec les consignes en cas de dépressurisation présentées par l'équipage au début du vol : l'adulte doit s'équiper du masque à oxygène avant de mettre celui de l'enfant assis à côté de lui.

"En cas de dépressurisation d'urgence, l'adulte devra rester assis et attaché et je ne vois pas comment il pourrait mettre le masque de l'enfant assis de l'autre côté", commente M. Pollard. Cette directive est en outre incompatible avec la procédure de préparation de la cabine en cas d'évacuation d'urgence qui préconise de mettre les enfants entre deux adultes, relève le même syndicat.

"Pour le service juridique d'Air France, les probabilités d'attouchements sexuels sont plus élevées que celles de dépressurisation d'urgence", soulignent plusieurs PNC, souhaitant garder l'anonymat.

Estimant que la vie des enfants peut être mise en danger, certains pilotes ont décidé de ne pas appliquer cette directive.

"Depuis la mise en place de cette procédure, aucun incident de sécurité n'a été observé", a indiqué Air France dans un communiqué, précisant que la procédure datait de mi-juillet 2009. "La DGAC (direction générale de l'aviation civile) a validé ces procédures qui participent d'une politique générale par rapport à ces problèmes d'attouchements", a indiqué de son côté un porte-parole de la DGAC tout en reconnaissant les limites de cette directive.

Il faut dire que la prise en charge de ces enfants, âgés de 4 à 12 ans, est un véritable casse-tête. Surtout quand ils sont en grand nombre sur le même vol, puisque Air France ne fixe pas de limite au nombre de ses jeunes passagers.

"La procédure chez Corsairfly est à ce jour d'assoir un passager de sexe féminin à côté de l'UM", a précisé une porte-parole, car statistiquement, la pédophilie est plus le fait d'hommes. Une statistique dont British Airways a fait les frais. Cet été, elle a été condamnée pour discrimination après avoir appliqué strictement cette même consigne : un homme avait déposé plainte après que l'hôtesse lui eut demandé de se déplacer pour ne pas le laisser à côté d'un enfant non accompagné.

 

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