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27/06/2008

Le droit de porter des armes

Copie de sbohem_jane.jpegLa Cour suprême des Etats-Unis a pour la première fois confirmé le droit de chaque citoyen américain à disposer d'une arme pour son usage personnel et invalidé une loi qui en limite le port dans la capitale fédérale.

La municipalité de Washington a interdit la détention d'armes de poing et exige que les propriétaires de fusil conservent leurs armes déchargées, démontées ou neutralisées.

La plus haute juridiction du pays ne s'était pas penchée depuis 1939 sur le deuxième amendement de la Constitution, qui donne lieu à des lectures totalement divergentes. Elle n'avait pu alors trancher le débat constitutionnel.

Certains y voient la reconnaissance du droit de chaque individu à détenir une arme; les autres estiment qu'il s'agit d'un droit collectif qui ne peut être reconnu qu'en relation avec une affectation dans un service de police ou de garde.

Par cinq voix contre quatre, les magistrats ont estimé que le deuxième amendement protégeait le droit de chaque individu à posséder une arme et à en faire usage dans le cadre prévu par la loi.

Un individu peut ainsi utiliser son arme en cas de légitime défense dans sa maison, a expliqué le juge Antonin Scalia.

Il a toutefois précisé que ce droit, bien qu'étant constitutionnel, comportait certaines limites et a souligné que la décision de la Cour suprême ne remettait pas en cause les réglementations qui encadrent depuis longtemps la détention et le port d'arme.

C'est la première fois que la Cour suprême invalide une législation sur le port et la détention d'armes au motif qu'elle est contraire au deuxième amendement. Sa décision pourrait donner lieu à une série de recours contre les lois locales sur le contrôle des armes adoptées pour lutter contre la criminalité.

LA MAISON BLANCHE SALUE LA DÉCISION

Sur cette question très sensible aux Etats-Unis, la majorité des magistrats, dont les deux juges nommés par le président George Bush, John Roberts et Samuel Alito, ont tranché en faveur de la ligne défendue par les libéraux-conservateurs.

"Nous sommes heureux que la Cour suprême ait affirmé que le deuxième amendement protège le droit des Américains à posséder et porter une arme", a déclaré le porte-parole de la Maison blanche Tony Fratto.

En revanche, l'un des quatre magistrats de la Cour suprême qui avait exprimé un avis contraire, a estimé que cette décision "menace de remettre en question la constitutionnalité des lois sur les armes dans tous les Etats-Unis".

Le candidat du Parti républicain à l'élection présidentielle, John McCain, s'est réjoui de la décision de la Cour suprême.

"A la différence d'une certaine conception élitiste qui considère que les Américains s'accrochent aux armes par amertume, ce jugement reconnaît que posséder une arme est un droit fondamental, sacré, toute comme la liberté d'expression et de réunion", a déclaré le sénateur de l'Arizona, faisant référence aux propos tenus par son rival démocrate Barack Obama. Pendant la campagne des primaires, le sénateur de l'Illinois a déclaré que les habitants des petites villes, amers, se raccrochaient aux armes et à la religion.

Les Etats-Unis détiennent le record du nombre d'habitants possédant une arme à feu. Les armes à feu font chaque jour 80 morts en moyenne aux Etats-Unis, selon les statistiques des Centers for Disease Control. Sur les 80 décès, il s'agit dans 34 cas d'un homicide.

Ecrit il y a plus de 200 ans, le deuxième amendement de la constitution américaine déclare: "Une milice bien organisée étant nécessaire à la sécurité d'un Etat libre, le droit qu'a le peuple de détenir et de porter des armes ne sera pas transgressé".

Reuters, jeudi 26 juin 2008,  Jeremy Pelofsky, version française Jean-Philippe Lefief et Gwénaëlle Barzic

CourSupremeArmes.pdf

Armes2amendements.pdf

06:44 Publié dans Justice | Lien permanent | Commentaires (4)

26/06/2008

infans conceptus pro nato habetur

abortion-08-01.jpgQuotidien du médecin, 18 janv. 2008

Le droit de la famille n'en finit plus de (se ?) nourrir (de) la rubrique des faits divers ! Et comme toujours en la matière, les pays anglo-saxons sont le plus souvent à la pointe de l'actualité, nous laissant entrevoir un futur possible aux accents d'une dangereuse réalité (V. P. Murat, Droit de la famille 2030 : Dr. famille 2008, repère 1). L'histoire débute aux États-Unis en 1990 avec le mariage d'un couple qui ne parvient pas à avoir d'enfants et qui recourt à la procréation médicale assistée. Par fécondation in vitro, plusieurs embryons sont créés en juin 2001 mais les deux tentatives d'implantation des embryons échouent. Au décès du mari un mois plus tard, restent deux embryons congelés. En juin 2002, la veuve décide d'une grossesse en « utilisant » ces embryons congelés. Un enfant naît dont le lien de filiation est établi à l'égard des deux parents. Confrontée à des difficultés financières, la mère effectue une demande de versement auprès de l'assurance sociale de son mari, à son profit et à celui de l'enfant. Les services sociaux opposent un refus arguant du fait que la loi ne considère comme héritiers que les enfants conçus avant le décès du père. Se pose alors la question de savoir si la date de conception de l'embryon est celle de la fécondation in vitro ou bien seulement celle du début de la grossesse de la mère. À cette question, la Cour suprême de l'Arkansas refuse de répondre estimant que c'est au Parlement de l'État de se prononcer. La Cour souligne cependant le vide législatif en la matière, aucun texte ne prévoyant explicitement de « permettre à un enfant créé par fécondation in vitro et implanté après le décès du père d'hériter ».

L'application classique de la maxime infans conceptus pro nato habetur, quoties de commodies ejus agitur, dont l'arrêt Héranval demeure l'exemple traditionnel, conduirait ici à tenir pour né un embryon congelé parce qu'il irait de son avantage de le faire bénéficier d'un droit patrimonial. Alors certes, le législateur français a pris soin d'écarter en 1994 comme en 2004, la poursuite d'une procréation médicale assistée post mortem. Le fait divers américain ne doit toutefois pas manquer d'inviter à la prudence ceux qui réfléchissent à la loi bioéthique de demain et qui seraient tentés d'admettre, en 2009 au nom d'une certaine mondialisation du droit de la famille, une technique qui devient périlleuse si elle peut être utilisée post mortem (V. déjà, pour un couple séparé, CEDH, 7 mars 2006, Evans c/ Royaume-Uni).

Le péril est d'autant plus important que dans le même temps, on apprend d'une part qu'au Royaume-Uni, près de 1 200 000 embryons n'ont pas été utilisés sur les 2 137 924 créés dans le cadre d'un processus de procréation médicale assistée entre 1991 et 2005 et d'autre part, que la société californienne Stemagen a annoncé, le jeudi 17 janvier dernier, avoir créé cinq blastocystes (embryons âgés de cinq à sept jours) humains par clonage à partir de cellules de peau d'adultes et de vingt-cinq ovocytes prélevés sur des donneuses.

Ce sont donc des millions d'embryons congelés dans le monde qui pourraient être bénéficiaires de la maxime infans conceptus (à condition rappelons le, qu'ils finissent par naître vivants et viables). Il est toujours particulièrement intéressant de constater l'utilisation de techniques juridiques (ici une fiction) à des fins qui ne pouvaient être imaginées par ceux qui ont conçu ces techniques. On notera que jusqu'à une date récente, la médecine ne permettait pas une détermination scientifique de la date de la conception et que cette détermination demeure encore parfois aujourd'hui quelque peu approximative. C'est la raison d'être de l'article 311 du Code civil, dont la rédaction est bien évidemment antérieure aux prouesses de la procréation médicale assistée et qui énonce que l'enfant est présumé avoir été conçu pendant la période qui s'étend du trois centième au quatre-vingtième jour, inclusivement, avant la date de la naissance. La présomption contenue dans le texte qui demeure simple, pourrait être ainsi balayée en cas de procréation médicale assistée : on retrouve l'inadaptation souvent dénoncée du droit commun de la filiation en matière de PMA. La date de la conception, scientifiquement établie si la procréation n'est pas naturelle, pourrait alors devenir le point de départ de la maxime infans conceptus.

Au-delà des principes du droit de la filiation, au-delà des valeurs et des symboles, ce sont les aspects techniques patrimoniaux et plus particulièrement successoraux qui sont aussi en jeu. Imaginons que l'ensemble des embryons non utilisés lors du décès du père puisse potentiellement être utilisé par la mère pour mener à terme une grossesse et ce sont toutes les liquidations de successions qui sont désormais soumises à une condition potestative. Sauf à exiger de la mère une renonciation à la possibilité de recourir à une PMA post mortem (renonciation à un droit subjectif ?) ou bien encore à requérir la production lors du règlement de la succession d'un extrait des registres des PMA attestant l'absence d'héritiers potentiels du défunt (une sorte de conservation des hypothèques pour embryons congelés...), la pratique notariale devrait alors appliquer un principe de précaution face à ce qui deviendrait un « risque procréatif ». Car à n'en pas douter, si la procréation post mortem devient une réalité en France, la date de la conception devra être retenue pour l'application de la maxime infans conceptus, en fonction bien évidemment de l'intérêt supérieur de l'enfant !