21/02/2013
La juriste et le cochon
La juriste et chroniqueuse Marcela Iacub a entretenu avec l'ancien directeur du FMI une liaison de sept mois en 2012, dont elle a tiré un livre. Décrivant un être tiraillé, elle livre son analyse des événements du Sofitel, du Carlton et du couple Sinclair-DSK.
Dominique Strauss-Kahn revient sur le devant de la scène dans le registre de l'intime. L'ancien directeur du FMI est le héros malgré lui du livre Belle et Bête de la juriste Marcela Iacub. La chroniqueuse de Libération y raconte la liaison de sept mois qu'elle a entretenue en 2012 avec le socialiste. Elle y décrit un homme tiraillé entre sa nature «d'homme et de cochon». Le Nouvel Observateur en a publié les bonnes feuilles et a recueilli l'unique interview que Marcela Iacub donnera à ce sujet. Voici les points saillants de ces deux documents.
• La théorie de l'homme-cochon. «Le personnage principal est un être double, mi-homme mi-cochon (…). Ce qu'il y a de créatif, d'artistique chez Dominique Strauss-Kahn, de beau, appartient au cochon et non pas à l'homme. L'homme est affreux, le cochon est merveilleux même s'il est un cochon. C'est un artiste des égouts, un poète de l'abjection et de la saleté», résume au Nouvel Observateur Marcela Iacub pour évoquer la métaphore et fil conducteur de son roman. Sa définition du cochon? «Le cochon, c'est le présent, le plaisir, la vie qui veut s'imposer sans morale, qui prend sans conséquence.» Dans le roman, elle écrit: «Tu étais vieux, gros, petit et moche. Tu étais machiste et vulgaire (…), sans aucune culture. (…) Tu te comportais comme un méchant porc, tu n'étais plus la victime de la société mais mon bourreau.»
• Son appétit pour les femmes. «La liste de tes maîtresses, de tes conquêtes d'un jour, de tes putes successives et concomitantes montrait un autre aspect émouvant de ta vie de cochon. Ces femmes étaient laides et vulgaires comme si en chercher de jolies était déjà une manière d'être plus homme que cochon.»
• Ce qu'aurait été l'Élysée sous DSK. Marcela Iacub estime que DSK n'a jamais eu l'envie profonde de devenir président de la République, mais qu'il y a été poussé par sa femme, Anne Sinclair. «Tu as prétendu que tu étais prêt à donner ton sang pour la patrie, quand en vérité tu te serais servi de cette patrie pour verser ton sperme inépuisable. Tu aurais transformé l'Élysée en grande boîte échangiste, tu te serais servi de tes larbins, de tes employés comme de rabatteurs, d'organisateurs de partouzes.»
• L'affaire Diallo. Dans La Belle et la Bête, Marcela Iacub imagine ce qui a pu se passer au Sofitel de New York en mai 2011. «C'est un cochon qui prend une femme de chambre pour Catherine Deneuve dans Belle de jour. Seul un cochon peut trouver normal qu'une misérable immigrée africaine lui taille une pipe sans contrepartie, juste pour lui faire plaisir et rendre hommage à sa puissance. Et la pauvre est revenue dans la chambre sans que tu lui laisses un quelconque pourboire. La femme de chambre a été horriblement offensée mais pas violée.»
Sinclair «avait ce rêve d'être l'épouse d'un président»
• Le Carlton. Les amis de DSK qui l'ont convié à des parties fines «pensaient que s'ils organisaient des partouzes, ils allaient obtenir des bénéfices le jour où tu deviendrais président. Mais ils se trompaient car tu n'es pas reconnaissant de quoi que ce soit. (…) Tu aimes bien ces pauvres diables qui cherchent à te contenter. Tu aimais qu'ils paient tout, qu'ils t'attendent à ces soirées comme si tu étais un roi.» C'est cette attitude et non les relations de DSK avec les femmes rencontrées au cours de ces soirées, estime Marcela Iacub, qui est condamnable. «Cela fait de toi un salopard jouissant de l'humiliation d'autres personnes qui ne savent même pas qu'elles sont humiliées.»
• Anne Sinclair. Marcela Iacub réserve des mots très durs pour la journaliste qui a quitté DSK à l'été 2012. «Très peu de gens savaient que ta femme avait fait de toi un caniche. Tu ne pouvais pas envisager de la quitter parce que cette vie de luxe-là, c'était impossible d'y renoncer une fois que tu y avais goûté», écrit la juriste. Et de poursuivre: «Elle faisait semblant de ne pas se rendre compte que tu étais enchaîné à elle par son argent, plus elle te possédait, plus elle te soumettait à cette humiliation, à cette terrible prostitution.»
Marcela Iacub juge que, dans le couple DSK-Sinclair, c'était la journaliste, la plus ambitieuse. «Elle avait ce rêve d'être l'épouse d'un président. Et quand elle t'a connu, elle s'est dit: «Celui-ci est mon cheval. Le voilà enfin.» Si elle ne l'avait pas tant voulu, tu aurais abandonné la politique», est persuadée Marcela Iacub. Dans son entretien au Nouvel Observateur, la romancière en remet une couche sur le couple DSK-Sinclair: «J'ai compris à quel point elle est convaincue qu'elle et son mari appartiennent à la caste des maîtres du monde.» «Elle m'a dit la phrase que je rapporte dans mon livre: «Il n'y a aucun mal à se faire sucer par une femme de ménage.» Pour elle, le monde est séparé entre les maîtres et les serviteurs», affirme Marcela Iacub.
• Les motivations de l'auteur. Pour expliquer cette aventure avec l'ancien chef du FMI, qu'elle qualifie de «folie», Marcela Iacub suppose que leur histoire a servi d'«enquête de terrain» pour le livre. Elle explique aussi s'être comportée comme une «sainte» se sentant obligée de sauver quelqu'un de «honni et méprisé». Elle confie enfin avoir été au moment de cette rencontre «très déprimée». «Je devinais qu'un homme si égoïste pouvait se transformer en instrument de ma destruction», avance-t-elle. Les étapes de la liaison évoquées dans son roman sont authentiques, précise-t-elle. En revanche, les scènes sexuelles relèvent du «merveilleux».
Interrogée sur son opinion actuelle de DSK, elle a confié au Nouvel Observateur : «Cet homme n'est pas un violeur, ni même un méchant. Son problème est que son égoïsme, sa pauvreté spirituelle et son absence de sensibilité le rendent très bête. Il croit que les autres sont stupides (…), il se sent plus malin et fait des conneries.» Et de conclure: «Il est condamné à tout rater à cause de cette cécité et de ce mépris», à moins, explique-t-elle dans La Belle et la Bête, que le cochon ne fasse «un coup d'État». «Tu t'enfermeras pour écrire et tu transformeras ton sperme en encre et tu prendras vraiment ton pied», prophétise-t-elle.
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