25/08/2009
Burqa, les raisons de ne pas être systématiquement "contre"
Pourquoi les Français veulent interdire la burqa ? Entretien avec John Bowen
John Bowen est anthropologue, professeur à l’université Washington de Saint Louis, aux États-Unis. Il est spécialiste de l’Islam et ses récents travaux ont porté en particulier sur les musulmans de France. Tombé en plein débat sur le voile, il a déplacé un temps sa problématique pour s’intéresser à la perception de l’Islam par les Français : son livre Why the French Don’t like Headscarves, paru en 2007, interroge les ressorts de la mobilisations des valeurs républicaines et laïques contre la menace que représenterait le foulard.
Alors que la "mission d’information parlementaire" sur le voile intégral a commencé ses auditions, et les poursuivra jusqu’en décembre 2009, John Bowen propose d’interroger le sens de cette nouvelle préoccupation du politique. S’agit-il de légiférer davantage sur l’espace public ? ou bien de s’ingérer jusque dans la sphère privée ?
nonfiction.fr : Comment expliquez-vous la résurgence actuelle de la question de la burqa ?
John Bowen : Il est difficile d’expliquer pourquoi cette question ressurgit maintenant, car ce n’est pas lié à un événement particulier. Dans mon livre sur le foulard (2007) j’ai cherché des liens entre les résurgences des déclarations sur le foulard et les événements qui se passaient dans le monde musulman, en Algérie ou en Afghanistan par exemple. Avec la burqa, c’est plutôt une longue histoire. On voit depuis quelques années en Italie du Nord, en Belgique, aux Pays-Bas, des tentatives des pouvoirs locaux pour interdire la burqa. Ces mouvements européens contre l’Islam rencontrent un fort écho en France, et pas seulement dans les milieux d’extrême-droite, car les Français sont imprégnés de l’idée qu’on ne doit pas tolérer ce qui divise, or la burqa divise un individu. Le débat traverse le continuum politique droite-gauche, en se focalisant sur l’idée des valeurs communes : même si on fait appel aux questions techniques des contrôles d’identité par exemple, c’est plutôt le fait d’avoir des cloisonnements, des communautés qui gêne.
nonfiction.fr : Pourquoi ce déplacement de l’école à la rue ?
John Bowen : Pendant les débats en 2002-2003 quelques voix disaient que si le voile était symbole d’oppression de la femme, alors il fallait l’abolir de l’espace public, que ce soit à l’école ou dans la rue. Ces propositions, très cohérentes dans leur raisonnement, n’ont pas été suivies car à ce moment la loi sur le voile devait répondre à un ensemble de problèmes propres à l’école, et qui préoccupaient les enseignants comme les directeurs d’établissements : la contestation des cours d’histoire sur la Shoah par exemple, ou l’adaptation des rythmes scolaires aux obligations religieuses. Dans ce contexte, l’affaire du voile a fourni une opportunité pour légiférer, et donner l’impression de résoudre par la loi des problèmes face auxquels les acteurs se trouvaient démunis. Cette manie française de faire des lois, on la retrouve encore récemment avec la loi sur les bandes et sur le port des cagoules…
nonfiction.fr : C’est une coïncidence amusante, ce parallèle entre la cagoule et la burqa !
John Bowen : Oui, ce n’était pas forcément intentionnel mais les deux participent d’une même question : comment on légifère sur l’espace public ? De manière générale, la France a une conception positive de l’espace public, comme le lieu des valeurs communes et du vivre ensemble, d’où tout signe porteur de division doit être évacué ; c’est le sens de la laïcité à la française. Cependant les limites de cet espace restent floues. Dans le concret, l’espace public c’est quoi : la rue ? l’école ? la mairie ?
Revenons sur le cas de la femme à qui on a refusé la nationalité française parce qu’elle portait la burqa – le raisonnement du gouvernement ce n’était pas de dire que les conditions n’étaient pas remplies pour l’obtention de la nationalité, mais de dire que, du fait qu’elle était ainsi vêtue, qu’elle restait chez elle, elle présentait un défaut d’assimilation. Voilà le point intéressant : le problème ne vient pas d’un trouble à l’ordre public, mais du fait de rester dans la sphère privée. C’est là que se trouve le changement : maintenant on va jusque dans la chambre, on l’a vu encore dans le débat sur l’annulation du mariage pour cause de non-virginité de l’épouse, une annulation qui n’était ni contestée par la femme, ni par les juges, mais par les voix politiques qui ont estimé que ces distinctions n’avaient pas lieu d’être dans la sphère privée. Dans l’affaire de la burqa, on considère que la vie privée peut être source de défauts dans la sphère publique – défaut de laïcité, d’assimilation etc. Ce qui m’intéresse beaucoup c’est l’évolution de la notion d’ordre public ; il y a d’une part l’espace public en ce qu’il s’oppose à l’espace intime, familial, et d’autre part il y a l’ordre public, cette idée très durkheimienne d’un ordre social, moral, qui peut être bafoué même en privé. Et c’est cette idée d’un ordre moral qui pourrait nous amener à une interprétation en faveur de l’interdiction de la burqa ; mais dans notre période post-Vichy on a du mal à parler d’ordre moral.
nonfiction.fr : Donc vous voulez dire qu’on sort du politique si on s’intéresse à la sphère privée ?
John Bowen : Je vois là une atteinte potentielle à la vie privée des gens, à la liberté dans la sphère privée. Avec la burqa, la question du communautarisme est maintenant portée sur le corps de la femme. Ce déplacement, qui paraît récent, s’inscrit pourtant dans le temps long, car la tension entre libertés individuelles et valeurs communes est une constante depuis la révolution française : il ne faut pas oublier qu’après 1789 il y a eu 1792. La France demeure traversée par cette tension entre l’État - expression de la volonté générale, et la liberté de l’individu. Cette tension qui apparaît clairement dans la pensée de Rousseau…
nonfiction.fr : Vous montrez d’ailleurs dans votre livre sur le foulard que la pensée rousseauiste imprègne fortement la mentalité française : est-ce que vous pensez que les petits Français devraient lire plus de philosophes anglo-saxons à l’école ?
John Bowen : C’est une question qui porte sur la pédagogie à l’école… depuis des années des efforts sont faits pour introduire la pensée des libéraux en France . Cependant, on peut trouver une défense de la liberté individuelle chez Rousseau, sans avoir recours à d’autres systèmes philosophiques qui seraient moins ancrés dans la pédagogie, l’histoire de la France.
D’autre part, ces questions ne posent pas seulement, de manière générale, le problème des libertés publiques, mais de manière plus particulière le problème de l’Islam en France. C’est ce que je cherche à montrer dans mon nouveau livre Can Islam Be French (L’Islam peut-il être français, à paraître, Princeton University Press). Il reste encore à inventer des formes de dialogue, à trouver des interlocuteurs privilégiés qui puissent, en quelque sorte, normaliser la présence de l’Islam en France
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Burqa, les raisons d'être "pour"
Me serais-je emballé trop vite en proposant ici même qu’on légifère fissa contre la burqa ? Je m’interroge.
On me l’a répété tout l’été : pourquoi stigmatiser ces femmes qui, si on ne les montrait pas du doigt, passeraient totalement inaperçues? Cet argument, qu’il soit rabâché par Eric Besson ou par Marie-George Buffet, n’est pas dénué de logique formelle : après tout, rendre les femmes invisibles est bel et bien l’objet social de ladite burqa. Mais d’autres événements estivaux sont venus étayer mes velléités de virage de cuti sur la question.
Tout d’abord, alors que le pays redécouvre les dangers de la canicule, force est de constater que les porteuses de voile intégral sont moins exposées que leurs sœurs impies aux misères de l’insolation et donc des cancers cutanés afférents. Depuis des décennies, les multinationales cosmétiques s’escrimaient à inventer le véritable écran total : vous bilez plus, les mecs, on l’a trouvé ! Désormais, il ne restera plus qu’à régler quelques petits problèmes liés à l’hypersudation…
Toujours dans l’optique du principe de précaution, un autre argument plaide en faveur de l’autorisation du port de la burqa, voire de son caractère obligatoire : l’épidémie de grippe A. Non seulement la burqa fait office de masque antiviral, mais en outre, le code moral qui va avec, guère propice au frotti-frotta - même le plus prétendument innocent - est un rempart phénoménal contre la contamination par contact direct. Laver ses mains cinq fois par jour, c’est bien, ne jamais s’en servir, c’est mieux !
Enfin l’actualité nous sert un dernier argument en faveur d’une tolérance bien pensée. Car ce vêtement que j’ai moi-même fautivement qualifié d’archaïsme peut se révéler d’une totale modernité. Comme vous, j’ai été ému par ses images télévisées de femmes afghanes votant pour la première fois de leur vie, malgré les menaces des talibans. Mais auraient-elles pu le faire si on n’avait pas mis à leur disposition ces magnifiques isoloirs individuels et portatifs ?
Marc Cohen, Burqa, j'ai changé d'avis, sur Causeur
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04/08/2009
Oil supplies are running out fast
Catastrophic shortfalls threaten economic recovery, says world's top energy economist
By Steve Connor, Science Editor
Monday, 3 August 2009SHARE PRINTEMAILTEXT SIZE NORMALLARGEEXTRA LARGE
The world is heading for a catastrophic energy crunch that could cripple a global economic recovery because most of the major oil fields in the world have passed their peak production, a leading energy economist has warned.
Higher oil prices brought on by a rapid increase in demand and a stagnation, or even decline, in supply could blow any recovery off course, said Dr Fatih Birol, the chief economist at the respected International Energy Agency (IEA) in Paris, which is charged with the task of assessing future energy supplies by OECD countries.
In an interview with The Independent, Dr Birol said that the public and many governments appeared to be oblivious to the fact that the oil on which modern civilisation depends is running out far faster than previously predicted and that global production is likely to peak in about 10 years – at least a decade earlier than most governments had estimated.
But the first detailed assessment of more than 800 oil fields in the world, covering three quarters of global reserves, has found that most of the biggest fields have already peaked and that the rate of decline in oil production is now running at nearly twice the pace as calculated just two years ago. On top of this, there is a problem of chronic under-investment by oil-producing countries, a feature that is set to result in an "oil crunch" within the next five years which will jeopardise any hope of a recovery from the present global economic recession, he said.
In a stark warning to Britain and the other Western powers, Dr Birol said that the market power of the very few oil-producing countries that hold substantial reserves of oil – mostly in the Middle East – would increase rapidly as the oil crisis begins to grip after 2010.
"One day we will run out of oil, it is not today or tomorrow, but one day we will run out of oil and we have to leave oil before oil leaves us, and we have to prepare ourselves for that day," Dr Birol said. "The earlier we start, the better, because all of our economic and social system is based on oil, so to change from that will take a lot of time and a lot of money and we should take this issue very seriously," he said.
"The market power of the very few oil-producing countries, mainly in the Middle East, will increase very quickly. They already have about 40 per cent share of the oil market and this will increase much more strongly in the future," he said.
There is now a real risk of a crunch in the oil supply after next year when demand picks up because not enough is being done to build up new supplies of oil to compensate for the rapid decline in existing fields.
The IEA estimates that the decline in oil production in existing fields is now running at 6.7 per cent a year compared to the 3.7 per cent decline it had estimated in 2007, which it now acknowledges to be wrong.
"If we see a tightness of the markets, people in the street will see it in terms of higher prices, much higher than we see now. It will have an impact on the economy, definitely, especially if we see this tightness in the markets in the next few years," Dr Birol said.
"It will be especially important because the global economy will still be very fragile, very vulnerable. Many people think there will be a recovery in a few years' time but it will be a slow recovery and a fragile recovery and we will have the risk that the recovery will be strangled with higher oil prices," he told The Independent.
In its first-ever assessment of the world's major oil fields, the IEA concluded that the global energy system was at a crossroads and that consumption of oil was "patently unsustainable", with expected demand far outstripping supply.
Oil production has already peaked in non-Opec countries and the era of cheap oil has come to an end, it warned.
In most fields, oil production has now peaked, which means that other sources of supply have to be found to meet existing demand.
Even if demand remained steady, the world would have to find the equivalent of four Saudi Arabias to maintain production, and six Saudi Arabias if it is to keep up with the expected increase in demand between now and 2030, Dr Birol said.
"It's a big challenge in terms of the geology, in terms of the investment and in terms of the geopolitics. So this is a big risk and it's mainly because of the rates of the declining oil fields," he said.
"Many governments now are more and more aware that at least the day of cheap and easy oil is over... [however] I'm not very optimistic about governments being aware of the difficulties we may face in the oil supply," he said.
Environmentalists fear that as supplies of conventional oil run out, governments will be forced to exploit even dirtier alternatives, such as the massive reserves of tar sands in Alberta, Canada, which would be immensely damaging to the environment because of the amount of energy needed to recover a barrel of tar-sand oil compared to the energy needed to collect the same amount of crude oil.
"Just because oil is running out faster than we have collectively assumed, does not mean the pressure is off on climate change," said Jeremy Leggett, a former oil-industry consultant and now a green entrepreneur with Solar Century.
"Shell and others want to turn to tar, and extract oil from coal. But these are very carbon-intensive processes, and will deepen the climate problem," Dr Leggett said.
"What we need to do is accelerate the mobilisation of renewables, energy efficiency and alternative transport.
"We have to do this for global warming reasons anyway, but the imminent energy crisis redoubles the imperative," he said.
Oil: An unclear future
*Why is oil so important as an energy source?
Crude oil has been critical for economic development and the smooth functioning of almost every aspect of society. Agriculture and food production is heavily dependent on oil for fuel and fertilisers. In the US, for instance, it takes the direct and indirect use of about six barrels of oil to raise one beef steer. It is the basis of most transport systems. Oil is also crucial to the drugs and chemicals industries and is a strategic asset for the military.
*How are oil reserves estimated?
The amount of oil recoverable is always going to be an assessment subject to the vagaries of economics – which determines the price of the oil and whether it is worth the costs of pumping it out –and technology, which determines how easy it is to discover and recover. Probable reserves have a better than 50 per cent chance of getting oil out. Possible reserves have less than 50 per cent chance.
*Why is there such disagreement over oil reserves?
All numbers tend to be informed estimates. Different experts make different assumptions so it is under- standable that they can come to different conclusions. Some countries see the size of their oilfields as a national security issue and do not want to provide accurate information. Another problem concerns how fast oil production is declining in fields that are past their peak production. The rate of decline can vary from field to field and this affects calculations on the size of the reserves. A further factor is the expected size of future demand for oil.
*What is "peak oil" and when will it be reached?
This is the point when the maximum rate at which oil is extracted reaches a peak because of technical and geological constraints, with global production going into decline from then on. The UK Government, along with many other governments, has believed that peak oil will not occur until well into the 21st Century, at least not until after 2030. The International Energy Agency believes peak oil will come perhaps by 2020. But it also believes that we are heading for an even earlier "oil crunch" because demand after 2010 is likely to exceed dwindling supplies.
*With global warming, why should we be worried about peak oil?
There are large reserves of non-conventional oil, such as the tar sands of Canada. But this oil is dirty and will produce vast amounts of carbon dioxide which will make a nonsense of any climate change agreement. Another problem concerns how fast oil production is declining in fields that are past their peak production. The rate of decline can vary from field to field and this affects calculations on the size of the reserves. If we are not adequately prepared for peak oil, global warming could become far worse than expected.
Steve Connor, Science Editor
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